Avant de nous entretenir en visio-conférence le 26 mai prochain, Julien Bayou nous a répondu avec cette lettre que nous publions intégralement.
Réponse de Julien Bayou
Tête de liste « l’Écologie, évidemment » aux élections régionales 2021 En Île-de-France
A l’interpellation des associations d’usagers RER D Val de Seine
Madame, Monsieur,
C’est avec beaucoup d‘intérêt que je réagis aux préconisations, issues du FORUM RER D Sud tenu le 10 avril dernier à Corbeil-Essonnes, que vous nous avez transmis.
Voici nos réactions en liaison étroite avec Jacques Picard qui figure en 24eme position sur notre liste en Essonne et, dont je sais qu’il a été, comme conseiller municipal en charge du RER D à Corbeil-Essonnes, un agent actif de la construction de ce Forum.
Tout d’abord, voici quatre remarques d’ordre général concernant la gouvernance du système de transport, la démocratisation, les spécificités liées au RER D et la déconstruction de quelques présupposés.
La gouvernance du système de transport en Île-de-France via IDFM est extrêmement lourde et l’ampleur des chantiers de modernisation du réseau amène des temps de réalisation des Services Actifs et des gros investissements qui comptent entre trois et dix ans. Il s’agit donc de distinguer ce qui est faisable à court, moyen et long terme. On notera d’ailleurs que tous les investissements en cours sont encore de l’ordre du rattrapage de l’abandon du train du quotidien au profit du TGV. L’état du réseau s’améliore pas à pas mais une partie des programmes du Nouveau Grand Paris voté en 2014 est encore en cours de réalisation.
La démocratisation des processus : il est clair que le SA 2019 du RER D, que la SNCF a réussi à « vendre » à la majorité régionale dirigée par Valérie Pécresse et à son VP en charge des transports et mobilités Stéphane Beaudet, a été imposé aux usagers sans débat au prétexte qu’il « ’il n’y aurait pas d’alternative ».
Ce qui transparait dans le processus du Forum que vous venez de conduire, c’est la capacité pour les associations et élu·es de construire une contre-expertise. Je suis en effet convaincu que nous ne ferons pas les prochains projets sans les usagères et usagers et qu’il revient aux pouvoir publics d’organiser et de susciter les espaces de débats et d’échanges nécessaires.
Et nous prenons l’engagement (de solliciter rapidement la CNDP pour construire le prochain Schéma Directeur du RER D. Ce qui permettra d’impliquer, avec la qualité du processus de débat public, tous les acteurs concernés : associations opérateurs, collectivités etc.
Sur les spécificités de la ligne RER D
- Longueur : 197 km du Nord au Sud
- Traversant 8 départements dont 2 hors IDF (60, 45),
- 59 gares desservies dont la gare de Châtelet – Les Halles (RATP),
- 12 trains/h en heure de pointe dans le tunnel commun avec la ligne RER B entre Châtelet – Les Halles et Gare du Nord (soit 32 trains à l’heure en pointe)
- Conflit de répartition des voies et des sillons entre Paris et Villeneuve Saint Georges et affectation des voies à Gare de Lyon surface.
- Entrée en voie unique à Bercy dont la solution (un terrier) est en cours depuis 20 ans.
- Fréquentation toujours en hausse et urbanisation non terminée sur Sénart et croissance de villes comme Corbeil-Essonnes.
Ce n’est qu’en prenant en compte ces spécificités que nous pourrons aboutir à une solution adaptée.
Déconstruire les présupposés :
Pour sortir du « il n’y a pas d’alternative » : il s’agit de réinterroger certains principes mis en avant par la SNCF, comme l’a rappelé Jacques Picard lors du Forum :
- Au nom de quoi le principe de construction de la desserte du RER C (plus on va loin plus les trains sont direct et semi directs – Brétigny à 21 mn de Paris) ne serait-il pas applicable au RER D ?
- La « Métroïsation totale » du RER D – tous les trains omnibus l’un derrière l’autre et ne se doublent pas, arrêt à toutes les gares – amène des temps de trajet Paris-Corbeil en 47-50 mn, avec une forte fatigue pour les usagers et des temps de 90 mn pour les bouts de ligne. Ce principe est contestable.
- La fameuse « robustesse » de la ligne (nombre de trains à l’heure et pénalités pour l’opérateur) comme horizon ne peut-elle pas être questionnée ? Au profit d’un équilibre entre temps de trajet, confort (trains directes) et ponctualité. Voilà une bonne question pour le débat public.
Concernant vos propositions :
P1 : La création d’une nouvelle ligne S du Transilien Malesherbes – Corbeil-Essonnes – Juvisy par Évry et Ris et directe Paris permettant des Corbeil-Paris en 30 mn a toute mon attention.
C’est votre proposition phare, dont les scénarios sont à approfondir, qui répond à l’inégalité de desserte entre branche Corbeil et branche Val d’Yerres qui avec la ligne R dispose de train Melun Paris en 25 mn.
Elle nécessitera de bousculer la répartition des sillons entre trains du quotidien, grandes lignes et TGV entre Villeneuve et Paris et la répartition des quais en gare de Lyon surface.
P2 : Ces 5 chantiers de travaux et de répartition des moyens nécessaires à votre p1 seront notre priorité. Le terrier de Bercy, chantier prioritaire mais fantôme et témoins de l’impuissance publique devra être inscrit au Contrat de Plan comme cela est demandé par les élu·es. Nous chercherons à le réaliser le plus rapidement possible.
P3 : premiers trains de la ligne S en 2023. Cela nous semble réalisable pour le SA 2023 (mis en service en décembre 2022), à l’instar des trains directs PICA du matin sur la branche Val- d’Yerres empruntant les voies TGV avant que ceux-ci arrivent.
Nous appuyons tout à fait l’idée de la refonte totale de la désert heure creuse, notamment portée par Jacques Picard. Il s’agir de sortir de la logique SNCF actuelle : la desserte heure creuse est construite simplement en enlevant des trains sur la trame heure pleine. Il s’agit donc de concevoir, alors que les sillons sont disponibles, de 5h à 7h, puis de 9h30 à 16h et enfin de 18h30 au dernier train (ce qui représente des usagers…), une trame avec des trains directes pour la vallée et des directes Paris Corbeil-Essonnes (ou mode ligne S).
Cette nouvelle desserte nécessite 3 ans, soit possibilité au SA 2024 au mieux.
P4 : retrouver en 2023 « des » trains directs pour les gares de la vallée et vers le sud : ce sont les améliorations de court terme qui ne nécessiteraient pas de refonte totale.
P5 : pérenniser les solutions de la branche Val d’Hyères, trains DICA et PICA. A cette occasion, nous pourrons interroger SNCF et RATP sur la non utilisation des 3 voies RER D disponibles à Châtelet pour faire retourner vers le sud un train au ¼ heure.
P6 : nouveaux objectifs et indicateurs pour l’opérateur : cela correspond à ce que nous disions en début de cette note au préambule n°4 sur la robustesse. Cela devra faire partie des questions du débat public.
P7 : Débat public : déjà répondu positivement dans le préambule
En conclusion : je voudrais vous dire que j’entends l’immense fatigue des usagers du RER D. Il appartient à la collectivité régionale d’élaborer des solutions opérationnelles pour y répondre.
Comme écologiste, je voudrais aussi partager avec vous une réflexion : le transport le plus économique et le plus écologique… c’est celui que nous n’avons pas à faire.
De ce point de vue, la grande couronne, à raison, se sent délaissée quant aux investissements qui pourraient générer un meilleur équilibre habitat emploi (vous en avez parlé dans votre forum). Il nous faut donc en même temps trouver de la capacité dans les TC mais aussi, et ce n’est pas la même temporalité, rééquilibrer notre région et son SDRIF.
Ajoutons que la mobilisation de crédits européens sur la transition écologique devrait permettre de densifier les infrastructures de TC en grande couronne et à leur maillage.
Réponse J. Bayou propositions RER D Val de Seine